Jacques Abeille et François Schuiten se sont rencontrés après que ce dernier a découvert
Les Jardins statuaires, roman du premier qui a été tout dernièrement réédité par les éditions Attila. Passionné par l'univers mystérieux et la plume de l'auteur, le dessinateur a illustré le livre. Mais la coopération entre les deux hommes ne devait pas s'arrêter là. S'appuyant sur des dessins de Schuiten,
Les Mers perdues est un texte inédit qui entraîne une nouvelle fois le lecteur dans des contrées aux décors fantasmagoriques.
On y trouve le récit épistolaire d'un des membres de l'expédition pour les
Mers perdues, région légendaire dont l'existence n'est pas vraiment confirmée. Accompagné d'un dessinateur, d'une géologue, de leur guide ainsi que d'une troupe de « sherpas » – du peuple des Hulains comme on les appelle – qui connaissent les régions explorées, le narrateur va aller à la rencontre de territoires abandonnés, mais où l'homme qui regarde avec attention ce qui l'entoure pourrait bien se retrouver...
À la découverte de contrées dépaysantes La couverture des
Mers perdues fournit un indice sur ce que les membres de l'équipe d'expédition vont rencontrer. En effet, des statues gigantesques vont se présenter aux personnages, au milieu de cités abandonnées dont les configurations et l'architecture sont étonnantes. Le narrateur et ses compagnons mettront longtemps à comprendre l'origine et le sens de ces constructions humaines entrelacées à ces effigies mi-humaines, mi-animales, et souvent mutilées.
Jacques Abeille, au travers de son personnage d'écrivain qui tient le journal de l'expédition, cherche à décrire l'incroyable de ces cités perdues, vides, qu'il est difficile d'assimiler. Toutefois, on n'est pas complètement transporté cette aventure qui décrit un voyage qui n'a pas vraiment de sens pendant la quasi-totalité du récit. Le lecteur, qui a l'impression qu'on le guide de sites impressionnants en panoramas fantastiques sans lien entre eux, cherche longtemps le fil directeur des
Mers perdues. Il le trouvera certes à la fin, mais c'est la prose exceptionnelle d'Abeille, émerveillante, qui le porte jusqu'au bout.
L'auteur est aidé dans ses descriptions par les esquisses et dessins de François Schuiten, qui illustrent magnifiquement le texte – ou que le texte illustre. Ils permettent de se faire une idée précise des informations fournies par le texte. Toutefois, on regrettera, à plusieurs reprises, la multiplication d'un même dessin, sous forme d'un crayonné d'essai puis d'une version en couleur et en grand format, qui donne une impression de remplissage des pages. Certes, tout cela est de grande beauté, mais l'équilibre entre texte est dessins n'est pas idéal, voire peut-être frustrant.
Voyage étonnant raconté dans un livre d'une qualité superbe qui semble caractéristique des éditions Attila,
Les Mers perdues vaut sans nul doute le détour, pour le magnifique travail de François Schuiten; même si les lecteurs des
Jardins statuaires ne s'y feront qu'une petite idée du talent de Jacques Abeille.